Le sujet du doute chez les chrétiens n’est pas tout à fait tabou. Mais il l’est presque.
C’est un sujet que l’on évite, et cela pour plusieurs raisons.
• Tu as peur du jugement des autres : Douter n’est pas bien vu. Tu as l’air d’un chrétien faible et peu affermi dans la foi. Qui te confierait des responsabilités dans l’Église si tu doutes ? Qui voudra épouser un chrétien qui doute ?
• Tu veux paraître « spirituel » : Toujours en lien avec le regard des autres. Nous luttons tous à un moment ou à un autre avec une forme d’orgueil spirituel. On se moque des Pharisiens de l’époque de Jésus qui « aimaient
prier debout aux coins des rues pour être vus » (Matthieu 6.5). Pourtant, nous leur ressemblons si souvent, admets-le…
• Tu as peur d’être contagieux : Cela part d’un bon sentiment. Tu te dis que parler de tes doutes peut semer le doute chez tes interlocuteurs, comme dans Inception, où une idée introduite dans l’esprit peut causer des ravages insoupçonnés. Et si le doute était comme la grippe ? De la même manière
que je tente de garder ma grippe pour moi en me lavant les mains
et en évitant les espaces publics, peut-être devrais-je garder mes doutes pour moi en portant le masque du bon petit soldat évangélique ?
Si c’est le cas, il semblerait que nous soyons plus « spirituels » que les auteurs et protagonistes de la Bible…
LE DOUTE N’EST PAS TABOU DANS LA BIBLE
La Bible est remplie d’exemples d’hommes et de femmes qui ont douté des paroles de Dieu :
• Abraham et Sarah qui rient d’incrédulité lorsque Dieu leur annonce qu’ils auront un enfant (Genèse 17.17-22, 18.10-15).
• David qui se sent abandonné par Dieu : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Psaumes 22.1), paroles reprises par Jésus sur la croix (Matthieu 27.46).
• Jean-Baptiste en prison qui se demande si Jésus est vraiment le Messie tant attendu (Matthieu 11.3).
• Les disciples de Jésus qui, devant leur Seigneur ressuscité, « eurent des doutes » (Matthieu 28.17). Et pourtant, ils avaient passé trois ans à ses côtés, et l’avaient entendu maintes fois annoncer sa résurrection future…
Quant aux chrétiens des générations passées, ils avaient moins de mal que nous à reconnaître que le doute faisait partie intégrante de la vie chrétienne. Voici un extrait de l’hymne « Tel que je suis », rédigé durant la première partie du 19e siècle :
Tel que je suis, bien vacillant,
En proie au doute à chaque instant,
Lutte au dehors, crainte au dedans
ALORS, QUE FAIRE DE MES DOUTES ?
Il n’y a pas de réponse facile. Loin de moi l’idée de proposer une recette toute faite (« 5 étapes pour être libéré de ses doutes ! »). Passer par des périodes de remise en question du contenu même de notre foi peut être très douloureux, voire traumatisant.
Perdre ses certitudes, c’est un peu comme avoir le sentiment de se retrouver les pieds dans un marécage, sans prises extérieures.
Plus on se débat, plus on s’enfonce…
Voici malgré tout cinq humbles propositions de ma part, en espérant qu’elles te soient utiles :
- Ne garde pas tes doutes pour toi, trouve des confidents à qui en parler. Il n’y a rien de pire que le sentiment de solitude lorsque l’on passe par des moments de doute. L’ennemi veut te faire croire que tu es le seul à être jamais passé par de telles remises en question. Ose te montrer vulnérable devant d’autres chrétiens. Trouve des alliés, qui ne te jugeront pas, mais qui lutteront avec toi en mettant en pratique cette exhortation : « Ayez de la compassion pour ceux qui doutent » (Jude 22).
- Si tes doutes sont d’ordre intellectuel ou moral, tu as le devoir de consulter les meilleures ressources sur le sujet. Il existe des livres ou articles en français sur la plupart des remises en question du message chrétien. Pars toujours du principe que la question que tu te poses a déjà été posée avant toi et qu’un chrétien compétent y a déjà répondu de manière pertinente. Tu ne peux pas te permettre de continuer à entretenir des doutes qui pourraient être réglés par une étude en profondeur du sujet, surtout si ces doutes te paralysent dans ton
engagement chrétien. Si tu ne sais pas par où commencer, lis le livre Je doute donc je crois de Alister McGrath, qui examine les doutes les plus fréquents. - Remets en question tes propres doutes. Et si tu doutais de tes doutes ? En effet, chaque remise en question des vérités bibliques se base sur des postulats de notre société séculière que nous avons souvent absorbés par osmose sans nous en rendre compte. Prenons l’exemple de l’enfer. Si le châtiment éternel des pécheurs sans Christ nous paraît injuste et disproportionné, c’est peut-être parce que nous n’avons pas une conception biblique de la sainteté de Dieu ni de l’horreur de notre péché. Cette même doctrine n’a pas forcément posé problème aux chrétiens des générations précédentes au fil des siècles. Alors pourquoi nous pose-t-elle problème aujourd’hui ? Tiens, voilà une question intéressante à creuser !
- Reconnais qu’il s’agit là avant tout d’un combat spirituel (cf. Éphésiens 6.10-17). Quand on pense à la notion de combat spirituel, on s’imagine parfois un combat cosmique entre des anges et des démons avec des épées géantes. En réalité, le cœur du combat spirituel se situe au niveau de tes pensées. Si l’ennemi peut saper notre confiance en Dieu et sa parole, alors il a remporté le combat.
Rappelle-toi, tout a commencé dans le jardin quand le serpent a demandé à Ève : « Dieu a-t-il vraiment dit…? » (Genèse 3.1). - Ne baisse surtout pas les bras, mais résiste. Je suis moi-même passé ces dernières années par une période de doutes qui a été très douloureuse. Et pourtant, j’en suis ressorti plus fort dans ma foi. Je prie pour toi, que Dieu puisse tailler dans le buisson de tes doutes afin de te permettre de voir la croix, le cœur de notre espérance. Et que, tel le phénix, tu puisses renaître de tes cendres et t’envoler vers des horizons insoupçonnés jusqu’alors.